Dans un monde sans mélancolie, les rossignols se mettraient à roter

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Ce titre est une citation issue des Syllogismes de l’amertume d’Emil Cioran. Pour une bonne partie, c’est un texte tiré de feu leverasoif. Oui, je sais, je fais de la récup. Pourquoi exhumer un vieux texte ? Parce qu’il le vaut bien ! Parce que je l’ai décidé et parce qu’il contient tout ce qui est important à mes yeux. Une rasade de vin, un chouia de philo, de la mélancolie, celle qui, comme les coups de soleil, fait mal la nuit, une touche d’absurdité, un rot, un pet, des pandas roux, un boukistanais et beaucoup de dérision. Cioran a surement raison, dans un monde sans mélancolie, les rossignols se mettraient à roter. Mais j’ajouterai que si dans ce monde sans mélancolie, sans amertume, si les rossignols devaient roter, alors, il faudrait aussi que les pandas roux pètent… Dans un monde mélancolique, rire est salutaire, le rire, c’est sérieux …  Imagine une soirée calme, tranquille, à siroter un verre de Meursault bien frais.

Même si tu n’es pas John Lennon, imagine encore, une forêt enneigée, une nuit hivernale est profonde comme seule peuvent l’être les nuits d’hiver, les écureuils font de cette nuit, une cathédrale éclatante. Soudain, j’entends un rot! C’est le rossignol de ma cave qui a roté? Peut-être est-ce un pet, une bouteille de champagne qui a pété? Cioran est un iconoclaste, malicieux et agitateur de neurone, il suppose que si nous n’avions pas cette prédisposition à la mélancolie, le chant du rossignol n’aurait pas plus d’effet sur nous que le coassement d’un crapaud, le cri d’un nénuphar ou le pet d’un panda, roux de surcroît. Pourtant le pet du panda est particulièrement mélodique, vous pouvez me croire sur parole. D’ailleurs, regardez la forme d’un pet de panda, ça ne rentre absolument pas dans un trou de mélancolie, même en poussant ! Un peu comme si on essaie de faire rentrer un cep de vigne dans une prise femelle, ça ne marche pas, il ne se passe rien. A part boucher bêtement la prise et se griller les gonades en essayant de la déboucher.

Philosophiquement, c’est un peu comme une prise mâle qui entre dans une prise femelle. Même pénétrées par la prise mâle, les trous de la prise femelle existent, comme le trou de la mélancolie existe en nous. Comme la prise mâle, le chant du rossignol, vient faire un trou dans nos émotions, elle se plante droit dans la prise femelle de la mélancolie. Simple, non?  Il ne faut pas être désagrégé de philo pour savoir ça! Sans mélancolie, le chant du rossignol ne serait juste qu’un son. Face à la dictature du mou, aux retours des  angoisses, des couvre-feux moraux et l’arrivée d’un politiquement correct vaseux, le pet est salutaire, puisqu’il fait rire. Se servir du rire pour faire face, c’est vieux comme la connerie. Rire de tout, de la mort, de l’absurdité humaine, de l’intolérance, du racisme, de mon voisin Boukistanais, rire du rire des autres … Rire en résistant, rire pour résister, résister pour rire, toutes les combinaisons sont possibles. C’est ça le pet du panda, c’est un air de musique sur le Titanic qui coule, dérisoire et magnifique. Il faut s’habituer aux vérités premières, le chant du rossignol est beau et triste parce que nous sommes beaux et tristes et le pet du panda est indispensable, comme le vin, l‘humour et les essuie-glaces, ça n’arrête pas la pluie mais ça permet d’avancer.