Vous n’aurez pas l’Alsace et ma migraine

Il était quoi ? 7H47, à peine plus, pas moins non plus d’ailleurs. C’est une soif monstrueuse et une haleine de chacal qui m’ont réveillé. Je me lève, je la bouscule, comme d’habitude. La journée va être longue et probablement laborieuse. 4 heures de sommeil, à peine plus. Vous êtes combien ? Dis-je au troupeau de saumons qui s’amuse dans ma baignoire. 7 mon Colonel, me répond le plus gros, on attend la choucroute pour rentrer chez nous. Gardez-m’en une tranche, leur dis-je d’un ton alerte à Malibu. Je rampe jusqu’à la cuisine, Philou le Breton y a passé la nuit, il arbore une magnifique cape de mousquetaire, un masque de Batman et une couche Pamper’s Baby Dry. Il me lance un couteau de cuisine au visage en finissant une énorme andouillette purée qu’il a saucé au miel. Entre deux bouchées à faire pâlir un Sénégalais, il lâche Milou, son doberman habillé par Karl Lagerfeld et va se cacher dans le four.  Salut Portos, lui lance-je en même temps que son couteau de cuisine et les oreilles de son clébard. Reste dans le four, t’es déjà farci comme une paupiette, je vais t’arroser au Sylvaner et je te boufferai à midi.

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Achtung Babyfoot

« Va t’échauffer, tu entres dans cinq minutes. » Il avait attendu ces mots longtemps. Faire une entrée fracassante, marquer le but décisif, devenir le héros du club, celui que les gamins rêvent d’imiter… ou, au moins, retrouver un peu de plaisir. A force d’user les bancs, à force de s’entraîner pour du beurre, il avait complètement oublié le but du jeu, se faire plaisir. Un jour, le football avait été un jeu. Il ne pouvait pas se plaindre, il était payé pour jouer, et bien payé, pour quelques minutes de jeu par année. La saison précédente, il avait été chômeur quelques mois, il avait dû s’inscrire, pointer, suivre les formations et les entretiens avec son conseiller, fournir des preuves de recherche d’emploi. Il avait eu un peu honte de s’asseoir là, au fond de la salle, au milieu de ces gens licenciés d’un travail bien plus pénible. Un jour, il avait été un prodige, à 16 ans, on lui prédisait une grande carrière, le nouveau « machin », le futur « truc ». Et puis, la blessure bête, le genou en carafe, la rééducation, loin de sa famille, de ses amis, il avait commencé à trouver sa vie moins rose. Quelques piges, re-blessure, un prêt dans un club qui se battait contre la relégation, la bans et … il avait de nouveau sa chance ! Il allait la saisir …

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Les loges de la paresse

ParessePresque 20 jours de disparition totale, j’espère que vous n’avez pas appelé la police du vin ? Ne vous inquiétez pas, je ne suis pas parti en Suisse pour planquer mes lingots tarbais et mes grands crus Bordelais, non, j’avais un peu de taf, du travail, de la besogne à finir, enfin, un vrai travail, pas un truc qui consiste à raconter une vie dont tout le monde se fout comme de son premier mauvais beaujolais. Tout ça pour te dire que le travail, même si c’est la santé, c’est aussi un peu le bagne. De servitude, pour les philosophes de l’Antiquité, à valeur refuge pour nos sociétés modernes, le travail à beaucoup changé en 3.000 ans. Pourtant, le travail n’a jamais rendu les gens heureux, demandez à un gilet jaune ce qu’il en pense. Paria ou marginal, le paresseux a toujours suscité autant louanges que dédain, jusqu’à Emmanuel Macron. Pourtant, depuis l’Antiquité, les philosophes font l’éloge de l’oisiveté contre le dogme du travail. Mais pourquoi défendent-ils la paresse ? Préférer l’oisiveté n’est pas un vilain défaut.

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Et surtout la santé …

Indiscutablement, 2018 aura été marqué par un évènement, les noces royales de Meghan et du prince Harry, l’amour était partout, mais surtout dans les coffres de Buckingham Palace. Les Français se sont remariés avec leur équipe de Football avec les pieds et le populisme est monté un peu partout, du Brésil à l’Italie où les ponts se sont écroulés de chagrin. Les gilets jaunes ont fêté le cinquantenaire de mai 68 à leur façon, le roi d’Arabie Saoudite a autorisé les femmes à conduire, mais toujours sous la Burqa.  La planète continue doucement de dépérir et les terroristes ne sont pas encore en vacances. Bref, il va falloir faire la fête pour oublier ça ?

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Gilet jaune, beau nez rouge, les couleurs de la Loire

Le jaune revient à la mode. Le beau gilet nouveau est arrivé. Comme les « bonnets rouges » de 1675, comme les « chemises vertes » de 1927, les « gilets jaunes » de 2018 expriment leur grogne. De chemises vertes en bonnets rouges, de marche violette en révolution orange, jusqu’aux gueules noires, il n’est pas de mouvement social qui ne se soit revêtu d’un parement coloré pour mieux identifier leur colère. Il n’y a guère que le bleu roi qui échappe à cette mode. Je sais qu’il est de bon ton d’être du côté des jaunes, je partage même une partie de leurs revendications, mais je pense aussi que toute lutte qui a pour seule fin la satisfaction de ses seuls intérêts, n’est pas une juste lutte. Le « Nationale Opportunisme » qui s’est formé autour de Mélenchon, Collard, Dupont Lajoie me dérange, m’obliger à mettre un gilet jaune pour passer un barrage me dérange encore plus, et pourquoi pas une étoile ? Rouler vaut bien un gilet pour certain. L’accessoire de sécurité devient un « must have », un sauf-conduit. Sans gilets, c’est l’attente. Avec la tunique or, c’est l’espoir de s’exfiltrer des bouchons sans risque. Liberté, égalité, gilet de sécurité ! Il parait que les gilets jaunes seraient apolitiques. Pourtant, lorsque Dieudonné se présente sur l’un de leurs barrages, il est accueilli à bras ouverts. Certains gilets jaunes seraient amateurs de quenelles… décidément, certains gilets jaunes cachent mal leurs chemises brunes !

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Mémoire de nos verres

Il est important de se souvenir, des belles choses, des vieilles choses, des belles personnes et des grands vins que l’on boit. Le souvenir et à la mémoire sont indispensable à notre équilibre. Tout ce qui n’est pas oublié n’est pas nécessairement l’objet d’un souvenir. J’ai gardé en mémoire la liste des appellations de la côte de nuits sans que celle-ci ne constitue un souvenir, car cette liste n’est pas une réalité temporelle, susceptible d’être passée, présente où future. J’ai le souvenir de la première fois où je me suis promené, avec quelques amis, près de la croix de la Romanée Conti. Pour se souvenir, il faut qu’il y ait eu une expérience passée, par exemple goûter un excellent Meursault avec son meilleur ami. Il faut garder la mémoire de ce que nous buvons, goutons, écoutons ou de ce que nous pensons. Nos souvenirs accumulés se conservent. Ils ne sont pas stockés quelque part, inertes, mais déterminent nos actes. Un souvenir est inconscient, mais il est toujours là, qui pousse pour entrer dans le champ de la conscience et agir. L’ensemble de nos souvenirs, c’est notre histoire, notre mémoire fait que nous avons une histoire. Les souvenirs que nous perdons sont ceux dont nous n’avons pas besoin pour agir. Ils n’en sont pas pour autant détruits, le passé est intégralement conservé, mais ne resurgit que pour et dans l’action. Lorsque les exigences de celle-ci se relâchent, la conscience peut se replonger dans le passé.

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On ne joue pas à saute-mouton avec une licorne d’abondance

saute-moutons

coussinUne question perturbe mon cervelet de panda pékinois ensuqué depuis maintenant 41 jours, 6 heures et 17 minutes : pourquoi compte-t-on les moutons ? J’entends par là pourquoi les moutons plus que les porcs qui piquent, les canards, les musaraignes mouchetées, les bœufs de Kobe ou les bouteilles de Petrus ?  Oui j’ai quelques troubles au niveau du sommeil depuis que j’ai surpris Régis en train de se taper un trait d’Ajax sur la cuvette plaquée or de mes toilettes. Dès lors, chaque nuit, à l’heure où les gogo-danseuses comptent la recette accrochée à leur string à paillettes, à l’heure où les derniers fêtards piquent du nez, à l’heure où les derniers prolos partent à l’usine, je mâte ce réveil apocalyptique qui m’indique de ses chiffres rouges accusateurs, et ce à intervalle plus ou moins régulier, à quel point il est important de ne pas se lever.  Dès lors comme tout le monde, j’ai essayé la bonne vieille méthode des moutons, c’est à ce moment précis d’ailleurs que je me suis interrogé sur la pertinence du décompte des moutons ! D’où la première interrogation, exorde de ce texte ?

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En attendant les monstres

« Quand le monde ancien tombe et que le monde nouveau ne s’est pas encore relevé, s’ouvre le temps des monstres« . Nous sommes entrés dans une période de grande insécurité. Ceux que certains prennent pour une période de paix, surtout dans les pays industrialisés et donc riche, est en réalité, une période en suspend.  Nous sommes suspendus à l’annonce du retour des monstres. Les guerres n’ont pas disparu, elles passent sous silence, les terroristes terrorisent toujours, mais loin des télévisions, les migrants migrent toujours et leur migration n’est vu que d’un œil, celui du politique avant celui de l’humanitaire. La planète s’assèche doucement et dans l’indifférence presque totale. J’ai le sentiment que, tous, nous attendons le monstre. Nous sommes en cellule, seul, nous protégeons notre petite cellule sans penser à protéger les autres, ceux qui ne partagent pas nos idées, nos valeurs, mais qui vivent sur la même planète et respirent le même air. Nous ne voyons le monde que d’un seul œil. Nous sommes tous des cyclopes.

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Un Gode n’est pas une divinité en glaise

Bière de Babylone
Bière de Babylone

Samedi matin, au volant de mon destrier, encore dans les vapeurs de la magnifique soirée du Goth de House, je me demandais sous quel angle j’allais attaquer le compte rendu. Bercé par la voix grave, sourde, rocheuse de Jean Claude Ameisen (sur les épaules de Darwin), j’avais le souvenir de quelques magnifiques et vieux flacons, du sourire de Mélanie Pfister et du Tee-shirt brassicole de JeanDa. Quand, comme une évidence, le conteur poétique de France inter me donna les clés. Sur les épaules de Darwin, sur les épaules des géants et voir plus loin, voire à travers le temps. Le croissant fertile du moyen Orient est le berceau de toutes les agricultures. Kalam (le pays) en Sumérien, Mésopotamie pour les Grecs, est aussi le berceau de l’écriture et de la bière.

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L’amer, la bouillabaisse et le blanc Cassis

Je connais un mec qui facture 3.000 boules une prestation de FengShui parce qu’il a déplacé 3 burlingues et ajouté un Yucca, pour un bon avocat c’est 400 de l’heure, une passe dans un Algeco avec une malienne c’est 60, un audit pour une PME c’est entre 10.000 et 150.000 € pour démontrer qu’il ne faut plus que l’entreprise fasse ce type de dépense, un travailleur sans papelard c’est 600 par mois, le même régularisé c’est 1200 plus les charges, un slip en peau de dragon du Komodo c’est 300 et une bouillabaisse sur le vieux port de Marseille c’est le PIB du Congo. Quand la bouffe prend l’ascenseur social, ça fait mal au cul. L’arnaque à la bouillabaisse, c’est un classique de l’été marseillais, un cliché parmi les clichés. bouillabaisseCet emblème de la cuisine populaire n’est plus le plat des pauvres pêcheurs, c’est devenu un plat de riches, servi dans les établissements gastronomiques, un produit d’appel pour les restos du Vieux-Port ou les calanques à touristes. Pour la partie liquide, ce n’est guère mieux. Le blanc de Cassis, sec et sans âme. Pas de quoi se resservir la nuit et encore moins en ramener à la maison. J’avais envie de tout casser, mais j’ai finalement, j’ai compris que la violence ne résout rien quand j’ai vu ce moustique se poser sur mon testicule gauche. Bref, je suis rentré le corps couvert de piqure de moustique, l’estomac dans l’étalon et une furieuse envie de déboucher un bon rouquin.

Ça tombe bien, sur les conseils éclairés de la seule personne qui semblait avoir quelques connaissances œnologiques (Le Chai Cassidain à Cassis), j’ai ramené un Coteaux d’Aix, maigre butin, une syrah acoquinée à de la Grenache et du Cabernet. Premier nez, on se risque sur le bizarre, le sauvage, y a de la bête mouillée là-dedans, pas spectaculaire mais bien tapi au fond. Puis, doucement, ça se met en place et ça te met une belle baffe. Ça cause dans la poste, comme dirait Ranulphe, ça envoi du steak, ça ramone comme disait Joey. On se laisse happer par ses notes de cassis, le fruit, pas la ville qui sent les pieds de touristes allemands, la mûre, des accents du sud, pas l’accent ridicule du kéké de Marseille, l’accent de la garrigue, de l’iode des calanques, du thym de Provence. La bouche virevolte comme une danseuse boiteuse. Elle sautille, claque, frappe des mains et des pieds. Un fruit noir, une perle, une olive et un bois justement dosé. La danseuse est fraiche, sa finale te met une deuxième baffe en pleine tronche. Chocolat à la menthe et une magnifique amertume. Oui, amère comme une bouillabaisse sur le vieux port, amère comme un blanc de cassis à 35 boules sur le port de cassis, amère comme la fille que t’a beaucoup aimé et qui n’a jamais rappelé. Cet amer-là. Mais l’amer de la danseuse, c’est le meilleur, parce que quand, sur la fin, béat, tu chiales comme un con, tu revis le plus beau, la danse.

Coteaux d’Aix Terra d’Or Cuvée Vieille Vignes 2006 Domaine les Béates