Au bal des pépés, c’est Goethe qui compte les bouses à la fin

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Il y a plein de choses qui m’énerve dans la vie, les chauves qui portent des lunettes de soleil sur la tête, les gens qui dépassent dans une file d’attente, les gens qui crachent par terre, être mis en attente, l’impolitesse en général et tous ces gens qui te prennent pour un con. Dans le vin, ce qui m’énerve, c’est le manque d’ouverture d’esprit, ceux qui pensent que, parce que c’est nature, c’est forcément bon, ou à contrario, ceux qui pensent que si c’est nature, c’est fait par un écolo-bobo suceur de graines germés qui a commis une bouse. Le schisme est consommé, dénaturé, la discorde est totale, plus que la véritable recette des Carbonara avec ou sans crème, les nouveaux pête-couilles du vins sont arrivés et se livrent un combat sans merci où le vin ne sortira pas gagnant. Les deux camps m’énervent, c’est un peu comme si on te demandais si tu préférais tes hémorroïdes, interne ou externes ? Mais pourquoi le vin fait-il de nous des horribles réacs ? Pas plus tard qu’hier, dans une dégustation, un type que je ne connais ni d’Eve, ni des dents, me demande :

  • Tu connais Thierry Esparade ?
  • Non, je devrais ? C’est quoi cette manie de citer des blazes de mec à la volée ?  Dans quel autre domaine tu te dois de connaitre tout le monde ? Tu connais Gerhard Lamprecht toi ? Non, c’est normal, c’est un réalisateur de film. Si tu as une quelconque curiosité pour les bouses filmique, tu dois regarder son dernier film « love my gourou coucou » qui compte parmi les plus grands maléfices commis par l’homme. A la fin de sa présentation, la moitié de la salle s’est jetée sur des grenades dégoupillées. C’est presque de la magie de foirer un film à ce point. Cela dit, il est favori pour la palme d’or de cannes. Le cinéma, c’est comme le vin nature, tu fais une bouse et tout le monde t’encense.
  • Non, mais c’est un jeune vigneron qui s’est installé sur une petite parcelle de l’Aveyron, il a arraché les pommiers pour faire un vin bouleversant, émouvant !
  • Émouvant ! rien que ça, toi, tu n’as jamais vu « il faut sauver willy » ? Je suis certains qu’on sent bien les bouleversantes pommes arrachées dans son vin ?
  • Oui, c’est sûr, t’as déjà gouté ?
  • Non mais j’imagine que la bouteille est onirique, la capsule tintinnabulante et le vin pétrogène et turpide ?

Je hais les pête-couilles ! Je hais les gens qui te chie un orchestre symphonique chaque fois qu’ils débouchent une bouteille. Tous ces œnologues du dimanche qui pensent avoir fait la dernière découverte biblique dans un vin qui sent uniquement le cul de vache qui vient de se faire une tournante dans le parc aux taureaux. D’un côté, des espèces de mages qui forniquent avec leurs vignes et enterrent des cornes de vache remplies de merde pour en avoir moins dans leurs vins, tout en leurs chantant « ave maria » en araméen ; et de l’autre, des réacs qui paniquent dès qu’un Illuminati vineux ne fait pas comme ses ancêtres. Et au milieu de ce marasme, il y a moi et quelques autres, pour qui le vin est bon quand il est bon et pas bon quand il n’est pas bon. Je hais les pête-couille, tous ses sommeliers pas bien câblés qui s’habillent en bleu de travail vintage, avec des mi-short en toile japonaise et des tongs en peau de couilles de loup, oui la peau de couilles de loup est bouleversante, émouvante, tout ça pour te servir, avec moultes discours sur les non-intrants, des vins de merde en te souhaitant une bonne dégustation. Ils se foutent de ma gueule en plus. Tout ce pataquès alors que le vin nature ne représente qu’un infime partie de la production de vin. C’est un peu comme si le Pape venait nous parler de sodomie alors qu’il n’a jamais été plus loin que le missionnaire avec sœur Mathilde. Tu la connais la sœur Mathilde toi ? 

Le nez est un chouia végétal, herbes aromatiques, agrumes; litchi. La bulle est fine, la bouche est sèche et pointue, l’acidité est importante et porte une longueur moyenne. Musc’ à bulles Frédéric Mochel

Note : 2.5 sur 5.

Belles bulles de chardonnay, agrumes, paille, brioché. La bouche est portée par une très grosse acidité ? C’est rond, assez élégant et assez long. Spumante Dosaggio Zero Blanc de Blancs Alessandra Divella

Note : 3 sur 5.

Belle robe framboise, un nez de fraise, de framboise, de mandarine et de rose avec des notes racinaires.  La bouche est marquée par des amers, une jolie rondeur et une persistance intéressante. Blanc de saignée, 100% pinot noir, Rosé Brut Nature Drappier

Note : 3.5 sur 5.

Un nez sur la volatile, de poudre à canon, de silex, agrume et bergamote. Le nez est plus bizarre, ronde, pas très en place, pas très gourmande et pas très longue. Je suis dérouté, mais où est passé le sylvaner ? Sylvaner 119 Bernard et Arthur Bohn

Note : 2 sur 5.

Un nez de pêche de vigne, de fruits jaunes, d’herbes aromatiques et de vanille. La bouche est ronde, agréable, légèrement sucrée avec une joli finale. Tiens, on a retrouvé le Sylvaner ! Franconie Sylvaner 2014 Stephan Vetter

Note : 3 sur 5.

Sur ce vin, le riesling est bien présent, terpène, noisette, menthe, agrumes, fruits jaunes. La bouche est sapide, minérale avec une touche iodée et une joli persistance. Riesling Schieferberg 2012 Bernard et Arthur Bohn

Note : 3 sur 5.

Ce Riesling étonne par son nez, très riche, complexe, gourmand, sur les amandes, le pamplemousse, le cédrat, l’orange et la menthe fraiche. La bouche est plus florale, c’est structuré, racé, construit et très plaisant. Grosse matière portée par une ligne acide impeccable, une fine minéralité qui étire le plaisir. Centgrafenberg Riesling Großes Gewächs 2014 Rudolf Fürst 

Note : 4 sur 5.

Joli nez d’agrumes, de poire, d’amande fraiche, fleurs blanches et un touche de bois. La bouche est élégante, vive, serrée, portée par une belle acidité qui étire longuement la finale minérale. L’élégance et la minéralité qui caractérisent les vins de Jean Marc Roulot se retrouvent dans ce chardonnay argentin élevé en œuf béton. Patagonie Bodega Chacra Chardonnay 2021

Note : 3 sur 5.

Une robe or pâle, un nez sur ces petites notes grillées et pierre à fusil que j’adore. Des notes de poire, de noisette grillée, de mirabelle complètent le bouquet. La bouche impressionne par son tranchant, sa minéralité et sa structure où rien ne dépasse. C’est sec, tendu et très long. La classe à Meursault. Meursault 2016  Coche Dury

Note : 4 sur 5.

Pétard, grillé, agrumes et fruits jaunes au nez. En bouche, fruit, touche minérale et des amers important qui gâche un peu la finale. L’assyrtiko, c’est pas ma came. Santorini  Assyrtiko Pyritis Méga Cuvée 2018 Artemis Karamolegos

Note : 2 sur 5.

Un nez complexe et racé, des notes d’abricot, de levure de bière, d’herbes médicinale, racinaire et de marc (alcool). La bouche est presque tannique (comme la bière) avec une acidité un peu haute pour moi. Finale sur la gentiane. Gold R 2020 Vincent Gross

Note : 3 sur 5.

Nez sur le bois, la framboise, la mélisse, la cerise et une pointe racinaire. La bouche est puissante, sur le bois, fraiche avec des petits amers sur la finale. Pinot Noir 2012 Domaine Stentz-Buecher

Note : 2 sur 5.

Alors, le vin nature est-il mauvais ? Très mauvais ? Dégueulasse ou franchement dégueulasse ? Une hérésie de l’œnologie ? Je vous répondrais que le vin nature, ça ne m’intéresse pas, en boire, ça ne m’intéresse pas, en goûter, ça ne m’intéresse pas, d’où sa vient, d’où ça sort, ça ne m’intéresse pas. Mais, comme je ne vous hais point, enfin pas tous, je vais vous dire d’où ça vient. Les grandes grèves des ouvriers viticoles de 1903 et 1904 tout comme la Révolte des vignerons de 1907 dans le Languedoc exigeaient déjà un « vin naturel », produit uniquement à partir de jus de raisin et sans « fabrication artificielle ». Ces dernières révoltes ont abouti à l’adoption de la loi du 29 juin 1907 interdisant le mouillage du vin par ajout d’eau et l’abus de sucrage. Il est de bon ton de dire que les vins naturels c’est bon, c’est super, c’est hype, c’est cool, bref, c’est tendance. Ce qui me dérange vraiment c’est le traitement que certains font de ce terme. Les vins natures ont été pris en otage par des sommeliers, des écrivains du vin, des blogueurs en mal de sujets clivants. Ils existent une faune de « bio-cons », de vigneron « ayatollesque » incapables de prendre un peu de recul et de goûter sereinement leur production de merde. Il est ridicule de penser que seuls les vins nature seraient bons ou que les vins possédant des arômes déviants, pas nets et ridiculement proches de la fosse septique sont qualitatifs, parce que naturels. Dans quelle vision du vin sommes-nous pour nous laisser berner par de tels bonimenteurs ? Goethe a été l’inspirateur de Rudolf Steiner. Il a écrit : « Les anciens représentaient l’existence, nous, modernes, représentons habituellement l’effet ; ils peignaient le terrible, nous peignons terriblement ; ils décrivaient l’agréable, nous décrivons agréablement. De là viennent toutes les exagérations, tout le maniérisme, toute la fausse grâce, toute l’enflure ». (Voyage en Italie – 17 Mai 1787 – Tome II, p. 606-609)

50% pinot noir et 50 pinot gris. Un nez de framboise et de … framboise. La bouche est sûre, aigre et acide pour avec une pointe de sucre. Je ne comprends pas l’idée, pourquoi pas un assemblage de Merlot et d’Assyrtiko, personne n’a encore osé. Red Z’Epfig 2020 Domaine in Black

Note : 1 sur 5.

Nez sur le bois, la framboise, la mélisse, la cerise et une pointe racinaire. La bouche est puissante, sur le bois, fraiche avec des petits amers sur la finale. Pinot Noir 2012 Domaine Stentz-Buecher

Note : 2 sur 5.

Un nez plus discret sur des arômes de fruits noirs, de café, de fumée, d’épices et de pain toastés. La bouche est fraiche, les tannins sont souples et le ligne acide étire la finale. Quelques années de cave lui feront du bien. Pinot Noir Quintessence 2019 Domaine Charles Frey

Note : 3 sur 5.

Un nez sur des notes de chocolat noir, de cerise et de menthe. Si le nez est sympathique, la bouche l’est beaucoup moins. Ça pique, l’acidité est obsédante, les tannins sont durs et la finale est automnale. Volnay 1996 Olivier Leflaive

Note : 2 sur 5.

Nez un peu muet, sur le café et les fruits rouges. Une bouche un peu comme la précédente, acide avec des tannins saillants et une petite finale. Un vin qui me rend triste. Corton Renardes 2011 Michel Gay et Fils

Note : 2 sur 5.

100% Cabernet franc sur les épices douces, les fruits noirs, le cassis et la fumée. La bouche est ample, assez fraiche, peu fruitée mais la structure est là, ce n’est pas très charmeur mais rond et mûr, très structuré et finalement très bon. C’est l’essentiel. Les Picasses 2009 Olga Raffault

Note : 3 sur 5.

Un nez serré, dense, puisant, sur le cassis et la menthe. En bouche, même après 22 ans, c’est encore dur, puissant les tannins sont durs, le fine acidité a du mal à porter la finale. Cahors Clos St Jean 2000 Famille Jouffreau

Note : 2.5 sur 5.

Un canon de vieille Côte-Rôtie, mûre, cassis, cerise, violette, lard fumé, café, réglisse et sous-bois forment un bouquet classique et agréable. La bouche est vive, fraiche, les tannins sont agréables et légèrement poudreux et la finale est intéressante. Côtes Rôtie 1998 Domaine Levet

Note : 2 sur 5.

Un nez qui met du temps à s’installer, fruits noirs, prune, pivoine, violette, café brulé. En bouche, c’est loin d’être gourmand, c’est encore serré, plus large que long, les tannins sont (trop) présent, la fraicheur est là mais la matière est encore trop forte. Un vin qui aurait mérité un long carafe ou encore quelques années de cave. St Emilion Croix de Vignot 1999

Note : 3 sur 5.

Un peu comme le précédent, un nez serré, puissant, sur le cassis, la terre humide, les sous-bois, le café ? La bouche est également serrée, très grosse matière, fine acidité et tannins encore trop jeune. Comme le précédent, trop jeune ou un carafage obligatoire. Pommerol Cht Beauregard 2005

Note : 3.5 sur 5.

Un nez assez sympa, abricot, pomme, alcool de mirabelle, coing et fruits exotiques. En bouche, le jus est vif et fouette bien mes gencives. C’est ample, assez complexe et porté par une grosse charge acide et une amertume sur la finale. Impossible de reconnaitre le cépage, je pers mes repères, ce n’est pas désagréable, mais je n’ai pas terminé mon verre. Gewurztraminer Yuuyake 2018 Christophe Lindenlaub

Note : 3 sur 5.

Un nez de Porto, une bouche de Rivesaltes, mais que vient faire cette bouteille en Alsace. Seulement 600 bouteilles produites à Saint-Hippolyte, une rareté. Parfois, dans le cinéma, les disques, les livres, les éditions limitées ne sont que des arnaques répétées. On crée la rareté afin de vendre plus et plus cher, on défend la nature en utilisant des méthodes de multinationale. La valeur d’un vin n’a jamais été sa rareté ou son prix. Quinta das Cabras 2017 Editions limitées Muller-Koeberlé

Note : 1.5 sur 5.

J’ai eu la chance de gouter Marcel Lapierre, Zind Humbrecht, Thierry Allemand, Richard Leroy, Lalou Bize-Leroy … et j’ai aimé, follement aimé, pas pour le côté nature, pas parce que c’est la mode, mais parce que c’est objectivement et simplement très bon. D’autres, dont je tairais le nom, sont aussi nature et j’ai du mal à appeler cela un vin ! Les odeurs de serpillère, les arômes déviants, pas nets et totalement abscons, qui sous prétexte de naturel sont dits de qualité m’insupportent. La merde reste de la merde, même bien emballée dans une corne de vache. En fait, ils vinifient naturellement alors que les vrais vignerons vinifient la nature. Tous les vignerons essaient de magnifier la nature, d’exceller dans la culture du raisin tout en faisant parler le terroir. Le vin vivant n’est pas une invention des naturistes. Le terroir est plus fort et plus vivants que les modes. Certains naturistes sont en phase avec leur terroir, d’autres se plantent mais essaie de faire passer leur incompétence et leurs vins déviants, sans ressource, sans âme, sans joyeuseté, sans gourmandise, bourrés de brett, pour des perles de culture. L’imposture est particulièrement criarde quand ils se réfèrent au mouvement naturel instigué par Marcel Lapierre et Jules Chauvet. L’un, vigneron de Morgon, essayait de faire chanter le terroir et avait trouvé, dans les vinifications les plus naturelles, le moyen de rendre ses vins extraordinaires. L’autre, œnologue de génie a été un anarchiste révolutionnaire dans la vision industrielle du vin, dans une époque où il était de bon ton de produire, de faire pisser la vigne plutôt que de faire de la qualité. Marcel Lapierre employait du soufre et Jules Chauvet apportait une grande attention au travail sanitaire dans les chais. Deux phénomènes qui font aujourd’hui défauts dans de nombreuses propriétés dites « nature ». Un vigneron comme Richard Leroy, ce qu’il veut, c’est nous donner de l’émotion pas un cours de norme culturale. Quand, sous prétexte de boire une quille, on me donne des cours d’épanouissement personnel, de méditation, d’ouverture d’esprit et de calligraphie japonaise, j’ai vraiment l’impression d’être pris pour un con, un peu comme quand le serveur du balto me dit « bonne dégustation » en me servant mon café du matin. C’est le goût, les sensations organoleptiques, les émotions gustatives qui font qu’un vin est grand. En voulant faire des vins nature, l’alpha et l’oméga de l’agriculture, les terroristes de la pensée unique, oublient souvent que le monde du vin est multiplicité, diversité et que c’est en cela qu’il nous réjouit. J’en ai marre de ces cavistes bobo à peine déniaisé qui te parle de la dernière bouse de Thierry Esparade alors qu’il n’a jamais bu, Lapierre, Jamet, Rousseau, la Grange des Pères et une foultitude de vins extraordinaires. J’en ai marre de ces écolo-bobos qui ne comprennent la nature que par le bout de leur lorgnette, ils pensent que pour faire le vin parfait, il faut arroser un cep du Larzac greffé sur un trottoir de la place Monge et béni par le mage de la forêt. Ils vivent hors sol. Mais le pire, ils donnent des leçons de morale aux autres, les impies, les non-croyants, les mécréants ! Je veux bien prendre des leçons de vie par ceux qui la connaisse, mais arracher des pommiers pour faire un vin qui ressemble à du cidre, quel intérêt ? Le pire du pire, et ils en sont fier, c’est la course pour être le plus nature, le plus écolo, le plus cosmique… Pour quel résultat : faire des vins le moins buvable possible ? Alors oui, les adeptes du vin nature m’emmerdent profondément car, finalement, ils n’aiment pas le vin. Ils laissent de côté les plus grands vins, qu’ils soient conventionnels, en culture biodynamique ou biologiques. Je laisse le mot de la fin, toujours à Goethe : « le gâteau plaît à l’enfant, sans qu’il ne sache rien du pâtissier, et les cerises, au moineau, sans qu’il ne réfléchisse à la manière dont elles sont venues ». (Conversations avec Eckermann, 28 Février 1831, p.394) Allez un Goethe … (E Güeter) et bonne dégustation.