Selon Schopenhauer, c’est l’injustice qui est première. Sans elle, l’idée de justice serait inutile. On ne parlerait jamais de droit, s’il n’y avait jamais d’injustice. L’idée de justice n’existe, au fond, qu’à partir du moment où il y a un sentiment d’injustice. C’est uniquement de l’égoïsme de l’homme et de sa générosité limitée, que la justice tire son origine. Mais, qu’appelle-t-on injustice et comment se fait-il qu’il puisse y avoir un sentiment qui y soit attaché ? Si la domination est naturelle, le sentiment d’injustice ne serait-il pas simplement le ressentiment abusif des dominés ayant l’impression qu’ils ne sont pas à leur place, alors que cette place est dictée par la nature ? C’est comme si les petits poissons trouvaient injuste d’être avalés par les gros. Par nature, les poissons sont déterminés à nager, les gros à manger les petits en vertu d’un droit naturel. Est-ce pareil chez les humains ?