Résiste, prouve que tu existes …

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Comme disait la philosophe Lorie, « il faut avoir la positive attitude« , ce à quoi lui répondait sa copine France Gall, « résiste, prouve que tu existes, cherche ton bonheur partout, va, refuse ce monde égoïste, Yeah, yeah, yeah … » Quand notre vie même d’êtres humains est menacée, les questions d’ordre philosophique ressurgissent inévitablement. L’essence même de la philosophie n’est pas seulement de savoir distinguer les différents domaines de la pensée humaine, mais elle réside surtout dans la capacité à lier ces domaines pour constituer une vue d’ensemble du monde et de l’homme. Le philosophe contemple le monde dans son ensemble. La pandémie vient nous rappeler l’importance, et l’urgence, de questions auxquelles les philosophes ont consacré des débats animés. Les questions couvaient sous la cendre. Le virus les a réveillées, et nous donne l’occasion de saisir la pertinence des analyses d’Auguste Comte, le père du positivisme. La société est trop souvent perçue négativement. C’est l’ordre établi, l’État qui tend à étouffer les libertés individuelles. Certains, qui ignorent sans doute tout de Pol Pot, Pinochet ou Loukachenko, jugent aujourd’hui, en France, l’État autoritaire, sinon dictatorial. Le philosophe Alain écrivait que « la corrélation est évidente entre individu et société« , ce qui signifie que l’un n’est rien sans l’autre. C’est ce qu’a exprimé le Président dans son discours : pensons et agissons en solidaires, plutôt qu’en solitaires. Nous ne pouvons faire face à la pandémie que collectivement, mais le comportement de chacun est primordial, car chacun est tributaire des autres. Cela s’appelle une société, justement !

Auguste Comte

Dans notre société, il n’y a pas de droits sans devoirs. Il y a même prévalence des devoirs sur les droits. Pour Comte, « une société n’est pas plus décomposable en individus qu’une surface géométrique ne l’est en lignes, ou une ligne en points« . Nous avons, avant tout, des devoirs, et envers tous… La crise du coronavirus le démontre : le droit fondamental de vivre est suspendu au devoir pour chacun de respecter les consignes de confinement. « Nul ne possède plus d’autre droit que celui de toujours faire son devoir« . Il ne doit pas y avoir d’action sans étayage scientifique. Toutes les décisions prises en matière de gestion de la crise sanitaire doivent reposer sur un étayage scientifique, des arguments scientifiques, du moins éclairées par les experts scientifique, qui apportent les données épidémiologiques. Le Politique ne fait que suivre l’avis des scientifiques. C’est un principe de base de la philosophie positiviste. Pas de politique sans éthique. Que faire si le nombre de lits disponibles à l’hôpital est inférieur au nombre de malades dont la survie exige l’hospitalisation ? La crise nous confronte de plein fouet à la tragique cruauté des choix éthiques. On touche alors un ordre supérieur, où il convient de laisser parler son cœur. La prépondérance de la morale sur la science, tel est, pour Comte, le véritable ordre des priorités. Il faut faire, autant que possible, prévaloir les instincts sympathiques sur les impulsions égoïstes. Auguste Comte résume cela en une phrase : « l’Amour pour principe, l’Ordre pour base, et le Progrès pour but« . Ainsi prennent sens les notions de continuité alimentaire ou de continuité éducative. La société de consommation comprend bien des aspects détestables, mais, sans un minimum de biens de consommation, il n’y a plus de vie. Les chaînes d’approvisionnement sont des chaînes de survie, non de servitude. L’individu n’est rien sans ce qu’il reçoit des autres, sans éducation et sans ce qui le relie aux autres.

Pour Senèque: « La vie n’est pas d’attendre que les orages passent, c’est d’apprendre à danser sous la pluie« . La situation actuelle nous amène à devoir résister. C’est un immense défi qui se présente à nous. Si nous voulons éradiquer ce virus, il nous faut faire preuve d’un état d’esprit adapté et surtout partagé. Le risque est de se tromper, d’orienter notre résistance dans une mauvaise direction, au risque d’obtenir l’effet inverse à celui recherché. Nous avons tous un même objectif, enfin j’espère… Faire en sorte qu’il y ait le moins de victimes possible. Le pire serait d’être obligé de choisir les patients qui seraient traités en fonction de critères basés sur l’âge et les chances de guérison. Ce but commun est dicté par le devoir de se conformer aux règles de notre société. Dans notre situation, le besoin de liberté est tout à fait inadapté. S’opposer au virus mais pas aux règles, même astreignantes du confinement, car elles sont mises en place pour nous protéger tous… La dimension politique n’est plus d’actualité. Nous sommes en guerre contre un ennemi invisible que nous pouvons vaincre tous ensemble. Il s’agit de ne pas se tromper d’adversaire !

Personne ne devrait sortir et se réunir sauf pour de bonnes raisons.  Nous devons aussi saisir cette occasion pour jouir de l’instant en faisant ce que nous n’avons pas le temps de faire habituellement, en passant du temps avec nos proches, en expérimentant le télétravail, en réinventant nos métiers respectifs, en libérant notre créativité, en relisant les grands philosophes au lieu d’aller piller les supermarchés et créer une pénurie inutile et dangereuse pour tous. Si nous sommes égoïstes, nous allons perdre cette guerre. La seule stratégie gagnante est d’être orienté vers les autres en prenant soin d’eux, en prenant conscience de l’impact de nos actes sur le malade, le parent, l’ami ou l’inconnu que nous avons croisé… Si nous prenons soin des autres, nous prenons soin de nous. Cqfd ! Il nous faut penser collectif pour nous protéger individuellement. Pour le positiviste, avoir un comportement adapté, efficace et responsable, c’est se concentrer sur un objectif collectif de respect des règles et de profiter du confinement pour faire des choses agréables ou importantes pour chacun de nous. Nous gagnerons cette guerre et nous sauverons des vies en choisissant, en dehors de toute considération politique, une démarche humaniste. Ce virus se transmet par l’homme… Le positivisme aussi !

Et comme le disait le philosophe Yoda : que la force soit avec vous 🙂